Yoga et
harmonie intérieure
Par
Nicole Lattès
Nicole Lattès est PDG des éditions
Laffont.
La
première rencontre fut un fiasco, la
deuxième faillit m'éloigner du yoga à tout
jamais. Il en est pour cette discipline
comme pour tout enseignement, échange,
rencontre. J'ai toujours en tête la douce
fermeté d'un professeur de français qui m'a
entraînée à tout jamais dans le monde
merveilleux de l'écrit, du romanesque, dans
la connaissance de l'Histoire par le biais
magique "des histoires" et je n'oublierai
jamais la sécheresse, l'acidité plutôt d'un
professeur de géographie qui mettait un
point d'honneur à nous faire avaler la
longueur, la largeur et le débit exact d'un
fleuve plutôt que nous en offrir la poésie,
la violence, en un mot l'enchantement qui
porte, emporte et vous apprend tout.
La découverte et l'
apprentissage du yoga dépend aussi de la
rencontre avec "le" professeur qui devient
vite un maître. Celle qui faillit m'en
éloigner connaissait la technique, enfin
l'une d'entre elles : le Hata Yoga car il y
a xxx enseignements différents, mais elle le
transmettait comme on peut le faire d'un
cours de gymnastique un peu sadique qui
tétanise les muscle. Un cours a suffi car on
peut en effet adopter des postures de yoga
sans pour autant "pratiquer le yoga"... Et
puis j'ai eu la chance de rencontrer
Krishna. Il est indien, né à Pondichéry ;
enfant il a vu Auroville sortir de terre.
Cet homme qui a traversé des années
difficiles et laborieuses quand il est
arrivé en France il y a plus de vingt ans,
incarne cette Inde philosophique,
spirituelle et altruiste que nous
connaissons si peu.. Il faut une vie pour
comprendre ce continent et ce ne sont pas
les voyages rapides, sauts de puces, qui
vous y font entrer. Ils permettent de
"voir" mais pas de comprendre. Krishna
enseigne, il dit la beauté profonde mais
aussi la complexité de son pays, Il est
rayonnant et transmet avec patience et bonté
la finalité du yoga qui est contenue dans le
mot lui même : UNIR - MAITRISER; Le plus
souvent nos pensées désirent une chose,
notre volonté une autre et nos besoins sont
tout autres. En fait la pratique du yoga
harmonise les trois éléments et nous
réconcilie avec nous-même.
Kr'ishna a certainement lu
Patanjali, je ne lui ai jamais posé la
question, auteur supposé des yogasutras
publiés au début de notre ère et qui aborde
la technique du yoga comme totalement
indépendante de la religion. En fait
Patanjali est l'alter ego d'Hippocrate qui
en occident a séparé la médecine de la
religion. Il affirmait : "le yoga est un
enseignement dont le but est d'assouplir et
de tonifier le corps, d'apaiser les pensées
et les émotions perturbatrices pour nous
permettre d'être sereins" Et tout commence
par le souffle, ce qu'un bon professeur vous
enseigne immédiatement, C'est le premier
travail, fondateur. C'est vieux comme le
monde la conscience de la maîtrise du
souffle, aujourd'hui les neurologues
confirment son efficacité et l'appliquent
sur leurs patients. J'ai la chance de
publier les livres de Matthieu Ricard, moine
bouddhiste, qui utilise une belle métaphore
pour expliquer notre agitation psychique "le
cerveau est comme un arbre dans lequel
s'agitent en permanence des dizaines de
petits singes"... ce sont nos pensées. Alors
calmons les petits singes, et ensuite
viendront les postures, et des postures il
en existe des milliers, j'ai lu quelque part
84 OOO ce qui me semble relever de la
galéjade , mais il en a une quinzaine
essentielles et il faut savoir que varier la
position des pieds suffit à transformer tout
l'exercice., la tonicité du corps et
l'entraînement du souffle qui combat souvent
mieux qu'un médicament le mal de vivre. Pour
se sentir mieux dans sa vie inutile d'être
méditant et d'une souplesse extravagante. la
détermination et l'assiduité dans l'effort,
car l’effort est nécessaire comme dans tout
entraînement, suffisent, et un peu
d'exigence est largement récompensé par un
bien joli mot : l'harmonie intérieure...